Et si vous testiez les réseaux sociaux libres?

Vous vous êtes déjà inquiété de l’intrusion dans votre vie privée des grandes compagnies comme Facebook ou Google. Les changements constants des conditions d’utilisation de leur service, généralement jamais à votre avantage, vous posent énormément question ; mais comme vous ne connaissiez pas d’alternatives, vous restez sur ces réseaux, car en plus tous vos amis sont dessus. Il existe bel et bien des alternatives, basées sur des logiciels libres, et je vais vous en parler dans cet article. Avant de rentrer dans le vif du sujet, je vais vous expliquer la différence majeure entre ces réseaux, afin que vous compreniez bien pourquoi les réseaux sociaux « libres » sont plus respectueux de votre vie privée parce qu’ils sont, entre autre, décentralisés.

privacy

Pourquoi choisir un réseau libre?

Il y a des tas de raisons qui font qu’opter pour un réseau libre est la meilleure raison pour reprendre le contrôle de votre identité numérique. Le premier point, (et je pense qu’il ne faudrait plus le citer), est la surveillance. Bon nombre de grands services web sont la cible privilégiée des agences de renseignement, comme l’actualité nous l’indique régulièrement (Snowden, PLJRenseignement,…) Ensuite, sur les réseaux comme Facebook, vous êtes en réalité le produit que la marque vend. En effet, ces réseaux repèrent vos habitudes de consommation et vous cible de publicités. Je détaille toutes ces explications dans mon article: comment vous travaillez gratuitement pour de grandes compagnies. Mais ce n’est pas tout! Vous n’avez aucun contrôle sur les données que vous mettez sur ces réseaux, et même si vous décidez de supprimer quelque chose, cela restera stocké quelque part sur les serveurs de votre réseau préféré. De plus, vous êtes pris en otage: ces réseaux ont construit leur succès sur la gratuité du service, ont gagné des millions d’abonnés, et maintenant que les habitudes de l’internaute sont prises, ils peuvent monnayer vos publications: (que ce soit à des fins publicitaires, ou simplement pour être vu par tous vos contacts). Les algorithmes de Facebook et Twitter filtrent le contenu affiché et vos publications ne sont vues que par une partie de vos contacts. Et bien sûr, dans le cas où vous maintenez une page quelconque, vous devez passer obligatoirement par la case paiement pour augmenter votre visibilité (et cette visibilité a même tendance à s’écrouler…).

Réseau centralisé VS réseau décentralisé.

Qu’est-ce-que ces termes chinois, me direz-vous? En fait, ce n’est pas bien compliqué. Je vais expliquer le tout grossièrement, sans terme technique, histoire de ne pas vous perdre dans les explications. Imaginez un instant que Facebook est un gros silo à grains, les grains étant les données et messages que vous y mettez. Bien que vous y mettiez vos grains, seul Facebook détient la clé de la porte du silo, décidant seul de ce qu’il va faire des grains.

À l’inverse, un réseau décentralisé est une multitude de silos, plus petits, que l’on appelle pods ou instances. Vous pouvez décider de mettre vos grains dans un silo existant, au quel cas vous recevez une clé qui permettra d’aller dans l’espace où vous les stockez. Mais vous pouvez aussi décider de construire votre propre silo, et de le rajouter dans un parc qui en contient des tas, et qui communiquent entre eux. Ainsi les utilisateurs des silos extérieurs peuvent consulter votre réserve de graines (selon vous ce que vous décidez de laisser public). Bien sûr, comme vous avez accès à vos grains, ou si vous retirez votre silo du réseau, ces derniers ne seront plus visibles par personne. Vous restez le maître de vos semences, donc dans ce cas-ci de vos données.

Voici un petit schéma simplifié (parce qu’en réalité c’est un peu plus compliqué) qui explique la différence entre les deux systèmes:

socnetwork1

Attaquons-nous maintenant au vif du sujet. Je vais vous présenter deux réseaux sociaux alternatifs, qui sont les plus populaires. Parce que oui, ce ne sont pas les seuls, il en existe pléthore d’autres ! Cependant, deux de ces réseaux sortent un peu plus du lot (l’un plus que l’autre), je vais donc plutôt me concentrer sur ces deux-là. Le premier, aura plutôt tendance à remplacer Facebook, même si pour moi, son fonctionnement est bien plus intéressant. Le second, lui, ressemble plus à Twitter. Ce sont tous les deux des logiciels libres : vous pouvez les installer chez vous et les modifier à votre convenance.

Diaspora*

Diaspora* est un projet assez ancien qui a été mis a disposition de la communauté il y a quelques années. Et c’est bel et bien un beau projet communautaire : n’importe qui peut participer à l’élaboration du réseau et décider des futurs ajouts. Diaspora* combine à la fois la puissance de Twitter à l’aide des Hashtags, que vous pouvez demander à Diaspora de mémoriser pour suivre des recherches sur un sujet en un clic, et des cercles de Google +, qui sont nommés dans ce réseau « aspects ». Vous pouvez aussi mentionner quelqu’un dans un statut, comme vous le feriez sur Twitter, avec le petit @ juste devant le nom (exemple @cappadocius).

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Créer son pod peut être assez facile, pour peu que vous maîtrisiez la ligne de commande sous Linux. D’ailleurs, Diaspora* est en cours d’adaptation en paquet Debian, ce qui permettrait de l’installer qu’à l’aide d’une seule petite commande. Et le wiki du projet Diaspora détaille les instructions de manière très claire pour chaque système qui est supporté (bien sûr, pour ce genre de choses, oubliez totalement Windows).

Diaspora* est extrêmement soucieux de votre privée. Vous disposez d’outils pour exporter vos données en cas de fermeture ou migration de compte vers un autre pod, comme vous pouvez le voir sur l’image ci-dessous (mais de mémoire, l’import ne fonctionne pas encore):

diaspora2

Je vais parler maintenant de ce qui fait pour moi, la plus grande force de Diaspora*: sur la majorité des réseaux sociaux, lorsqu’un sujet vous intéresse, il est difficile d’interagir et de voir tous les posts liés à celui-ci, à moins de faire partie d’un groupe spécialement dédié à ce sujet ou d’être ami avec la personne qui parle de ce dernier. C’est là que les tags suivis (voir capture d’écran de l’interface plus bas) interviennent. Cliquez sur le mot clé qui vous intéresse, et tous les messages publics contenant ce mot-clé apparaîtront. Et bien sûr, vous pourrez participer à la conversation. Vous me direz que c’est faisable sur les autres réseaux, certes, je suis d’accord, mais en aucun cas cela ne sera aussi simplissime que sur Diaspora.

Autre point notable pour la rédaction des statuts, c’est l’utilisation du format Markdown qui est de plus en plus courant sur internet, permettant de ce fait de réaliser de jolis petits articles bien mis en page.

Je vous invite déjà à lire la présentation de Diaspora sur son site principal. Vous pourrez trouver également une liste des pods ouverts au public à cette adresse.

Mastodon: le mammouth qui écrase Twitter

Depuis quelques semaines, tout le monde parle de ce nouveau réseau qui gagne de nouvelles personnes à la pelle chaque jour : Mastodon. Ce réseau, lui, est construit de la même manière que Twitter, mais bien sûr, avec la différence qu’il est entièrement décentralisé. Des centaines de pods interagissent entre eux, et vous voyez des centaines de pouets ou toots (les deux mots sont utilisés, et sont l’équivalent des gazouillis que l’on éructe sur Twitter). La première bouffée d’air vient de la limitation de caractères : alors que Twitter nous limite toujours à 140 caractères, Mastodon, lui en propose 500 ! Les messages sont donc mieux construits et bien souvent plus lisibles.

Une belle différence dans le fonctionnement de Mastodon est que vous disposez non pas de un fil d’actualité, comme Twitter le propose, mais trois. Le premier est votre fil personnel, celui qui affiche tout ce que vos contacts racontent. Le second, est le fil de votre instance : vous voyez tous les pouets émis par votre pod Mastodon. Et le troisième est un fil décousu, plus global, où vous verrez tous les pouets des instances auxquelles votre pod est connecté. Il est donc très facile de suivre des tas de sujets, sans pour autant être abonné à des milliers de personnes et être noyé comme on peut vite l’être sur Twitter si l’on ne maîtrise pas le système de listes.

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Les autres

Il existe, comme je l’ai annoncé plus haut, des tas d’autres réseaux sociaux libres. Ils sont cependant nettement moins de succès. Pour en citer quelques-uns, vous avez Movim,qui permet de relier plusieurs types de communication en un seul lieu. Mais aussi Twister, un autre équivalent de Twitter, qui lui est basé sur la technologie Blockchain (qui nécessite donc que vous devez télécharger sur votre pc un nombre conséquent de données). Pour des réseaux ressemblant plus à Facebook, vous avez Friendica/Red Matrix, mais je dois dire que j’ai abandonné son utilisation il y a des années et je ne sais pas du tout où en est l’état du projet. Si le sujet vous intéresse, n’hésitez pas à aller jeter un petit coup d’oeil !

La seule difficulté : choisir son instance

Avant de conclure, je voulais juste parler d’une petite difficulté qui pourrait émerger dans votre petite tête : « d’accord, c’est bien beau, Greg, mais où est-ce que je m’inscris avec cette multitude de pods ? » Je dirais juste de choisir ce qui vous convient le mieux, de trouver l’instance où vous pouvez avoir confiance dans les administrateurs (si bien sûr, vous hébergez vous-même ne vous convient pas où que vous n’avez pas les connaissances techniques). Il existe des tas de pods, et vous pouvez faire votre marché. Pour Diaspora, vous avez la liste des pods actifs sur poduptime. Dans le cas de Mastodon, vous pouvez consulter cette liste. Dans chacun des cas, il indique si vous pouvez vous inscrire ou non. Pour ma part, j’ai choisi, comme toujours, les versions de Framasoft : Framasphere pour Diaspora* et Framapiaf pour Mastodon. Parce que c’est Framasoft et que j’admire le boulot qu’ils font (je sais, je n’arrête pas de le dire) et que les noms de leurs services sont framachouettes. Pour me voir sur Diaspora, c’est par ici ; tandis que pour Mastodon, c’est par là.

En guise de conclusion

Voilà, je pense avoir fait le tour de la question. Pour moi, il est impératif de prendre ces réseaux sociaux au sérieux: l’actualité nous démontre au quotidien que notre vie privée numérique est menacée. Alors, n’hésitez plus, rejoignez-nous. Et puis, comme le dit si bien l’adage : plus on est de fous, plus il y a de riz !

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15 Commentaires

  1. Retour PingEt si vous testiez les réseaux sociaux l...

  2. Je te recommande en effet de tester movim, car il n’y a pas besoin d’avoir tout le monde sur movim afin de leur parler , en effet, cela fonctionne au dessus de XMPP et donc, personnellement, quand je suis sur movim, j’ai mes contacts gmail, facebook, skype et jabber auxquels je peux parler 🙂

  3. Movim c’est impeccable ! L’interface est belle, c’est du XMPP donc compatible avec tout et porté sur l’avenir, on peut héberger soi-même ses données en créant son propre pod, etc… Faut encourager les développeurs et les aider car le projet démarre, et surtout en parler autour de soi ! Pour moi Movim c’est clairement le réseau social de demain.

    J’y suis, j’y reste et je recommande.

  4. OnNAPasLeDroitALAnonymat

    Ce n’a pas l’air d’être pas utilisé par grand monde, mais il existe aussi GNU Social : http://gnu.io/

  5. Et personne ne parle de Twister ? un réseau de microblogging en P2P ! http://twister.net.co/

  6. Retour PingEt si vous testiez les réseaux sociaux l...

  7. J’avais testé Diaspora, en son temps, et je n’avais pas été impressionné. Du tout.

    Le problème majeur de ces réseaux sociaux alternatifs, c’est que si c’est techniquement une bonne idée d’un point de vue « réseau », ça ne l’est pas du tout d’un point de vue « social », vu que les chances que vos amis y soient est à peu près nulle.

    • Le problème majeur selon moi, est que les réseaux sociaux libres sont arrivés bien tard, et a laissé le temps aux réseaux majeurs propriétaires de s’imposer sur le marché. Faute de « concurrence », les utilisateurs ont pris le pli facebook, et comme presque tout le monde est dessus, ils ne voient pas l’intérêt de changer de réseau social, de peur de perdre leurs contacts. Et malgré cela, à chaque changement dans les CGU (Conditions générales d’utilisation), il y a une levée de boucliers, mais ne prennent pas le pli de changer leurs habitudes. La preuve hier, sur ma page Facebook, où l’un de mes followers ne trouve aucun intérêt à changer parce que les sites qu’il suit sont sur ce réseau. Mais en changeant de comportement, en quittant ce réseau pour aller vers un autre, pour éviter de perdre en visibilité, ces sites devront aussi s’adapter et changer leurs habitudes.

      C’est pour cela que j’ai écrit cet article, pour mettre en évidence les alternatives, et montrer qu’il est possible de s’en passer.

      Certes, je n’ai pas beaucoup de contacts sur Diaspora*, mais ce réseau a mis l’accent sur la facilité de communiquer sur divers sujets, et je n’ai pas besoin d’avoir beaucoup d’amis pour pouvoir suivre et dialoguer sur les sujets qui m’intéresse. C’est pour moi ce qui fait sa force.

      De fait, les interfaces sont moins sexy, qu’il n’y a pas de jeux ou d’autres applications en tout genre. Ils se sont focalisés sur la raison d’être d’un réseau social: la communication. Je préfère un réseau moins « riche » en design et fonctionnalités, car il y a une chose essentielle que les réseaux propriétaires n’ont pas: le respect de ma vie privée et de mes données. Je communiquerai plus facilement de sujets privés sur ces réseaux que sur des Facebook et Google +, parce qu’il n’y a aucune transparence sur ce qu’ils font avec mes statuts et posts.

  8. Coquille : « Diaspora* est soucieux de votre privée », je pense que tu voulais écrire « votre vie privée ».

    Je précise que Friendica gère aussi les hashtags (par contre je crois que ça reste dans un seul pod). Je sais que la phrase était pour parler du couple hashtags + cercle, mais en lisant, on pourrait penser que cette fonctionnalité est absente de Friendica…
    Personnellement, je regrette identi.ca, c’est dommage que les gens n’ai pas pu faire comme sur Friendica : bien se répartir sur les différents pods… Je pense qu’un réseau comptant uniquement sur l’auto-hébergement ne sera jamais grand public. Moi je suis pas très Facebook/Friendica, plutôt Twitter/satusnet, du coup j’espère que Twister me conviendra lorsque je l’essaierai !

    Sont absents Jappix et SàT pourtant souvent cités aux côtés de Movim !

    Enfin, Friendica ne me pose pas de problème quant à son design (contrairement à identi.ca qui était moins joli), j’utilise le même thème que toi.

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