Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours détesté l’école. Une grande partie de mon cursus scolaire a été un véritable parcours du combattant, équivalent aux parcours des SEALS que l’on aperçoit dans GI Jane ou d’autres films pleins de testostérone, de pan-pans et de kikitoudur.
Certaines expériences, je ne m’en rappelle pas trop, ou alors j’ai quelques flashs. Ma mère m’a raconté que j’ai eu des problèmes à l’école dès la maternelle, mais comme je n’en ai aucun souvenirs, je ne vais pas relater de cela ici. En deuxième primaire, par contre, j’ai bel et bien ramassé, et ça, je m’en souviens. L’institutrice avait ses têtes de turc, et elle ne les ratait pas. Bien que je sois bon élève, je me retrouvais souvent au fond de la classe, avec un bonnet d’âne sur la tête. Et vers la fin de l’année, ce fut le drame.
Une bagarre de gamins, pour une bêtise, comme c’est si souvent le cas. Mais je gère mal l’adrénaline, et étant hypersensible, je me laisse envahir par mes émotions. J’ai encore ces images en tête, quelquefois, de ces enfants dans la cour de récré se moquant de moi en train de pleurer et de hurler de colère en vivant ce qu’ils étaient en train de m’infliger. J’ai changé d’école ensuite, où je suis resté trois ans. J’ai eu quelques petits soucis pendant la première année, mais après j’ai pu me faire un excellent ami avec qui je passais tout mon temps.
Le temps passa, et je suis arrivé en secondaire. Comme beaucoup d’ados, je faisais pas mal de bêtises, et je suis devenu un habitué de la salle de retenue. Mais des fois, de manière totalement injustifiée. La personne qui m’a d’ailleurs dégoûté des maths, un prof sans aucune pédagogie ni autorité sur ses élèves, m’a par exemple juste collé pour avoir rigolé d’une blague. Le blagueur, lui bien sûr, n’étant pas inquiété. Mais soit, passons sur ce prof, qui pourrait avoir rien que pour elle un billet complet. A partir de cette année-là, mes notes ont commencé à dégringoler d’année en année. Impossible d’étudier correctement, n’arrivant à mémoriser que les cours qui me passionnaient (et que je n’avais nul besoin d’étudier, cela rentrait tout seul).
Et mon mal-être à l’école grandit au fur et à mesure que le temps passait, en autre pour d’autres raisons que le scolaire, jusqu’à cette fameuse année 1998. Je commençais à souffrir de crises d’angoisses assez sévères et me suis retrouvé dans un état extrêmement dépressif. J’ai tenté, pour la première fois, le 3 mars, ce que je relate dans l’attaque du tigre. Je suis resté hospitalisé plus d’un mois, et après une brève tentative de retour à l’école, on a bien compris que c’était trop tôt.
Après une deuxième hospitalisation de juin à août, j’ai retenté le retour sur les bancs de l’école. La première difficulté était déjà que les élèves étaient maintenant deux ans plus jeune, puisque j’avais déjà doublé une première fois. Avec les expériences que je venais de traverser, j’avais l’impression d’être revenu en arrière, que rien n’avait changé. J’avais encore plus l’impression d’être un extra-terrestre, ma vision du monde changeait de plus en plus, mais l’école entière était au courant de ce qui s’était passé. Les comportements à mon égard étaient bizarres : certains me regardaient avec suspicion, d’autres à te demander toutes les 3 minutes si j’allais bien,… pas duré longtemps, et en octobre je dus repasser la case hospitalisation.
Durant celle-ci, j’ai appris qu’il était possible de faire les études qui m’intéressaient sans devoir repasser par la case des deux années qu’il me restait à faire. Je pouvais, moyennant un examen d’entrée, commencer des études d’assistant social. Je voulais que mon expérience puisse permettre à d’autres de s’en sortir et de pouvoir aider comme on l’avait fait pour moi. J’ai bossé comme un fou pour passer cet examen, avec l’aide entre autre d’Yves, un de mes anciens professeurs (et qui corrige d’ailleurs les billets du blog). Je l’ai réussi sans trop de difficultés.
Mais la première session d’examen ébranla totalement la légère confiance en moi que je venais d’acquérir. Mon premier oral était réussi, mais avec une côte de 11/20. Bien que tout le monde me disait que c’était bien pour un premier essai, surtout avec ce prof-là, je me trouvais médiocre. L’examen suivant fut le pompon. C’était de la philo morale. La prof, très spéciale, bégayait pendant les cours. Mais j’adorais son cours, et ce fut d’ailleurs le seul cours que je n’ai jamais manqué. L’examen commence et elle tire sa première salve : « vous êtes nouveau ? Parce que je ne vous ai jamais vu en cours ! » J’étais désarçonné. J’ai néanmoins commencé à répondre à la question de l’examen, mais arrivant presque au terme de la réponse, je perds les pédales. Panique totale, trou noir et je commence à bégayer. La prof a cru que je me moquais d’elle alors que simplement, je paniquais, et bien que ma réponse était au trois-quart bonne, je reçois la note de 2/10. Elle me rétorqua que j’étais immature, que j’avais étudié son cours par cœur et que je n’avais rien compris à ce qu’elle voulait m’enseigner. Ça m’a tellement cassé qu’au troisième oral, je suis arrivé tremblant comme une feuille avec des difficultés à respirer. Le prof me renvoya chez moi en me demandant de prendre un certif. Je n’ai pas su terminer mes études d’AS, déjà pour ces petites raisons, mais surtout je n’étais pas prêt. Trop sensible, trop empathique avec les usagers pendant les stages, c’était trop difficile pour moi.
J’ai alors tenté l’impensable : les premières sections informatiques ouvraient en secondaire. A 21 ans, je me suis retrouvé sur les bancs de l’école, à côtoyer des gamins de 16 et 17 ans. Presque tous les matins, je sortais tripes et boyaux, et quand cela ne se transformait pas en crise d’angoisse pure et simple, j’arrivais à me traîner jusqu’à l’école. Vous l’avez deviné, je n’ai pas pu terminer mon année.
En 2008, j’ai néanmoins repris le chemin de l’école, en cours du soir, histoire d’avoir le papier pour pouvoir lancer ma boîte au cas où. J’ai eu ce papier sans trop de difficultés, mais ce n’est pas réellement un diplôme. Je me suis rendu compte aussi, avec le temps, que j’apprenais nettement mieux en étudiant sans contrainte derrière, que si je me fixais l’objectif d’apprendre quelque chose, cela se passait extrêmement bien. Je ne suis pas plus bête qu’un autre, mais lorsqu’on m’impose quelque chose, et que je trouve cela absurde et illogique, ça ne fonctionne pas, mon esprit se bloque.
Parce que ça me révolte. Le fait d’accepter tout sans se poser de question, de faire comme la majorité sans chercher à comprendre quoi que ce soit me répugne. Ça m’énerve lorsqu’on me dit « monsieur Siebrand, vous n’avez pas de diplôme, de bachelier, de master » ou qu’on me dise « mais reprends des études ». Oui, je n’ai pas de diplôme et alors ? Pour la société bien pensante, être sans diplôme est synonyme d’échec. Pourtant je suis intelligent, j’ai juste un raisonnement différent. Je n’ai pas honte de mon parcours, j’ai fait des choses atypiques et cela a forgé mon caractère. Mais en Europe, ne pas avoir ce papier signifie être moins que rien, on ne s’attarde pas sur un sans diplôme, comme si ces expériences, ces parcours ne comptaient pas. Seul ce bout de papier semble compter pour nous définir en tant qu’être humain. Et c’est dur. Alors, par moments on désespère, on regrette de ne pas avoir ce papier, histoire d’avoir un peu plus de facilités dans ce monde de brute. Je trouve ça absurde, illogique et ça me met en colère. Je l’ai compris bien plus tard, ce qui compte réellement pour moi, ce sont nos vécus, nos expériences et ce que nous avons fait pour améliorer la vie de notre entourage, de le rendre heureux. Mais aucunement ce petit bout de papier qui montre qu’on a été bien sage à l’école.
Écrit dans le cadre du #SummerOfFail d’Alias
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Image de Tom Maglieri sous licence CC BY-NC-SA
Voilà un situation que je connais assez bien, bien que n’ayant pas vraiment été inquiété par les autres jeunes durant ma scolarité, en grande partie grace à ma taille et ma corpulence à l’époque, ben oui, quand à 13 ans tu fais 1m80 et 83 Kg, même si tu es un Geek des années 80 et 90, on ne t’emmerde pas trop … Et j’ai même réussi la majeure partie des cours sans ne jamais avoir à étudier … enfin pour les matières intéressante, Math, Français, science, histoire, cours complémentaire d’informatique et théâtre … Le hic c’était le reste …
Pas que je ne comprenais pas les cours, juste qu’ils étaient sans intérêt pour moi à l’époque, dès lors, rien que le fait de participer au cours devenait un calvaire insoutenable. C’est comme ça qu’a débuté mon enfer à l’école.
La prof de Religion / EDM et celle de néerlandais décident que je suis trop con pour suivre des études « générales », malgré mes notes au dessus de la moyenne dans les cours cités un peu plus haut (entre 16 et 20 tout le temps) je me prends un restriction qui m’envoie en technique de qualification et le début de mon blocage. Je me retrouve en électromécanique, je continue à avoir des notes au dessus de la moyenne dans la majeure partie des cours généraux, mais alors tout ce qui touche l’électricité, la mécanique et les cours de cette option, je suis busé … mais alors en beauté … pourtant, une grosse partie de ceux-ci ne sont que des maths, mais voilà, blocage.
Bref, j’arrive en rétho par un petit miracle qui veut que je suis capable de retenir par cœur un cours de 100 pages et me permet de finir mes examens de fin d’années à chaque fois et d’avoir tout oublié juste après, et de me prendre des remarques du genre « Laurent est un fainéant et se moque complètement des cours durant toute l’année »
Bref, tout ça pour dire qu’il y a un gros soucis avec le système éducatif actuel, celui-ci tend à enseigner la même chose à tout le monde, et quand on essaie d’apprendre à grimper dans un arbre à un poisson, un singe, un éléphant et un kangourou, il y a un gros soucis ….
Pire encore, les matières vues en cours sont obsolètes pour tous se qui se rapporte à un métier … Je me souviens que les machines de l’atelier de mécanique avaient à l’époque plus de 50 ans et ce sont toujours les même qui sont là, plus de 20 ans après mon passage désastreux là-bas ….
Ce n’est pas mon seul exemple, j’ai corrigé, il y a un peu moins de 2 ans, le cours d’informatique technique de l’institut Saint-Laurent à Liège, j’ai cru que j’allais faire une crise de nerfs en le lisant, c’était bourré de fautes, de choses fausses ou encore totalement dépassées. Et les élèves avaient un cours d’anglais technique … enfin ils appellent ça comme ça, mais ce cours tend à franciser tous les termes informatiques, du genre : »commutateur pour switch, prise femelle pour socket … »
Le problème avec ça, c’est que s’ils se présentent à un entretien d’embauche avec ce genre d’acquis ils vont se faire démonter, parce que s’ils tombent sur un recruteurs, tu sais, ces gens sans connaissance mais qui ont tous les pouvoirs et qui t’éliminent si tu ne ressembles pas à leur critère de sélection, ils ne vont pas se comprendre et s’ils tombent sur un informaticien, lui il va se foutre de leur gueule ….
Au final, je te comprends tout à fait, les diplômes ne veulent rien dire et on accorde beaucoup trop d’importance à un papier sans valeur (maladie humaine ça) …
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