Rencontre avec un auteur libre: Gee

Après un bon bout de temps, voici de nouveau une petite interview d’un auteur libre! Et non des moindres! Il s’agit en effet de Gee, fraîchement arrivé sur Wattpad sous le pseudo ptilouk

Il est plus connu pour ses bandes-dessinées, mais il écrit en plus de très belles nouvelles! Gee est d’ailleurs le dessinateur qui a permis la création des couvertures de deux mes ouvrages: « Le guide de survie pour les vieux » et « le rantbook d’un vieux crouton ». Allez, j’arrête de blablater, place aux réponses de Gee, qui nous offre un point de vue très intéressant sur la culture et que je partage à bien des niveaux!

* Peux-tu te présenter en quelques lignes ?

Alors, je vais te copier ce qui est écrit au dos de mes derniers bouquins :

« Gee est docteur en informatique (généraliste conventionné secteur 42), mais en dehors des heures de consultation, il est aussi auteur dessinateur de bandes dessinées. Il publie de nombreux « gribouillages » en ligne, parce que quitte à écrire des bêtises, autant qu’elles soient lues ! »

Donc voilà, ingénieur en informatique 35 heures par semaine, auteur/dessinateur de BD le reste du temps. L’écriture littéraire, c’est un truc qui m’a toujours attiré mais j’ai mis un moment à m’y mettre sérieusement. Là, j’suis lancé 🙂

* Maintenant que nous te connaissons un peu mieux, pourrais-tu présenter tes écrits ?

Comme en général, on parle surtout de mes BD, j’vais me concentrer sur les textes littéraires, tiens ! Pour l’instant j’ai publié 10 nouvelles en ligne, rassemblées dans un recueil auto-édité qui s’appelle « L’enfant sans bouche (et 9 autres nouvelles) ». Il n’y a pas de fil conducteur, ce sont principalement des nouvelles de science-fiction (parfois ça tire plutôt sur le fantastique ou l’heroic fantasy, mais c’est rare).

En général, j’ai un style plutôt classique, genre narrateur omniscient, troisième personne, passé simple. Faut dire que mes bouquins préférés, c’est toute l’Histoire du Futur d’Asimov (ça comprend les Robots et Fondation) ou encore Harry Potter (les bouquins qui m’ont accompagné pendant toute mon adolescence, j’ai l’impression d’avoir grandi en partie à Poudlard). Bref, en général j’ai une écriture assez simple et assez descriptive, sans être paresseuse pour autant (enfin j’espère). Ah oui, et j’ai le défaut de vouloir caser des épithètes partout, mais j’me soigne.

* Quel est ton genre d’écriture de prédilection ?

Plutôt de la SF, mais bon, je suis pas sectaire. Par exemple, je m’étais lancé le défi d’écrire une nouvelle d’heroic fantasy (« Le grimoire de l’éternité », l’une des 10 nouvelles citées au-dessus), et je me suis bien amusé. Écrire des trucs plus ou moins humoristiques, ça m’éclate assez aussi (je viens un peu de là, à la base, puisque mes BD sont plutôt à visée humoristique).

* Pourquoi as-tu choisi une alternative au droit d’auteurs classique et quelle licence utilises-tu ?

Par conviction, tout simplement. Le système du droit d’auteur classique ne marche pas : tu as moins de 10% des auteurs inscrits à l’AGESSA (la sécu des auteurs) en France qui touchent un SMIC ou plus avec leurs écrits. En gros, 90% qui n’en vivent pas (ou alors très mal). Et encore, si tu comptes ceux qui ne prennent pas la peine de s’inscrire à l’AGESSA, on doit plutôt être proche de 99%. Bref, le droit d’auteur fait vivre pas mal de monde dans la chaîne du livre, mais pas les auteurs. À côté de ça, tu as tout le système moisi de contrôle via les DRM, de culpabilisation du public qui partage sur des réseaux illégaux (Bittorrent et cie), de grande loterie autour d’un star-system à la con. J’veux dire, qui y gagne, à tout ce bazar ? C’est ni l’auteur, ni le public. Alors autant essayer autre chose, non ?

J’écris sous Creative Commons By Sa, c’est-à-dire que je fais du libre (CC By) tout en m’assurant que ça ne puisse pas être récupéré par les vautours de l’industrie culturelle (Sa).

* Où peut-on trouver tes histoires hors Wattpad/Scribay ?

Sur mon blog, pardi ! Je comprends l’intérêt des plate-formes toutes faites et des rézozozios pour le côté simple, accessible aux novices, mais bon : au bout d’un moment, si tu veux avoir les mains libres et ne plus dépendre du bon vouloir des actionnaires de telle ou telle plate-forme ou des CGU de 10 pieds de long qui t’entubent en long, en large et en travers… bah tu fais ton site. Alors je sais, tout le monde n’a pas les connaissances pour le faire et il faudrait que ce soit plus facile de passer le cap, mais y’a des gens qui y travaillent (coucou Framasoft).

Sinon pour les versions papier, faut passer par Lulu, tout simplement (mon recueil de nouvelles, on peut aussi le trouver sur Amazon, mais je touche moins d’argent dessus et il paraît même que la qualité d’impression est moins bonne, alors préférez Lulu).

* Donnes-tu l’opportunité à tes lecteurs de te soutenir (financièrement ou autre) ? Si oui, quels systèmes utilises-tu ?

Yep, je suis sur Tipeee et sinon y’a aussi juste mon compte PayPal pour faire des dons ponctuels. Mais honnêtement, je songe à virer tout ça. C’est un peu par principe que je les laisse, pour le côté « oui, c’est libre et gratuit, mais vous pouvez me soutenir si vous le voulez/pouvez, etc. ». Mais bon, j’ai un boulot stable et bien payé à côté, alors ça me fait toujours un peu bizarre de me dire qu’il y a des smicards, des précaires qui me filent 2€ par mois alors qu’ils en ont bien plus besoin que moi. Bref, le pognon, c’est toujours un sujet compliqué et j’me pose pas mal de questions.

* Hormis l’écriture de fictions, crées-tu d’autres œuvres artistiques sous licence libre ? (vidéo, jeu de rôles, peinture, dessin, etc.)

Un peu mon n’veu ! Bah déjà, les BD, j’en ai déjà parlé (5 tomes d’une série d’aventures geek, GKND, et 2 tomes compilés à partir de mon blog, Grise Bouille). Après, je fais un peu d’aquarelle, pi je compose et chante (enfin je gueule) des chansons de rock en français (j’aimerais avoir plus de temps pour ça, mais pour le moment je n’en ai publié que très peu malheureusement). Y’a guère que la vidéo à laquelle je ne m’attaque pas trop, parce qu’il faut être beaucoup et que j’aime bien être tout seul (et puis j’ai pas un emploi du temps extensible non plus, malheureusement).

* Quels sont tes auteurs préférés, qui t’inspirent ?

J’en ai déjà un peu parlé, mon auteur préféré, c’est Isaac Asimov : je trouve qu’il arrive à inventer des univers très très loin (dans le futur voire dans l’espace-temps) tout en leur donnant une crédibilité et en y intégrant de bons personnages auxquels on peut malgré tout s’identifier. Et le tout dans un style pas du tout ampoulé, très agréable à lire. Mention spéciale au cycle de Fondation qui est un truc fabuleux, ne serait-ce que pour le vertige que ça te donne quand t’arrives à la fin…

Après, j’aime aussi énormément Philip K Dick, qui est un peu à l’autre bout du spectre de la SF, avec des trucs complètement bizarres/barrés qui frôlent parfois le fantastique, avec des réalités jamais bien définies, des faux-semblants partout… et puis ses personnages qui sont systématiquement des types normaux, simples, souvent des loosers, c’est rafraîchissant : loin des habituel personnages principaux systématiquement soldats, héros, chevaliers, etc.

* Que conseillerais-tu à un jeune auteur qui hésite à déposer ses histoires sous licence libre ?

J’vais être direct : fais le deuil de tes rêves de gloire et de richesse. Être auteur, ça paie pas et pour la reconnaissance, dis toi que si tu as plusieurs dizaines de lecteurs, ce sera déjà génial. Le show-business est une loterie, si c’est ça qui t’intéresse, va jouer au Loto, tu perdras moins ton temps. Mais en tout cas, n’emmerde pas tes lecteurs en foutant un péage pour accéder à tes œuvres : si vraiment tu es un génie (et chanceux) et que tu écris le prochain Petit Prince, ce ne sont pas les licences libres qui vont t’empêcher d’en tirer partie (financièrement ou autrement).

Et pour le reste (parce que « libre », ça n’est pas seulement la liberté de partager gratuitement) : la licence libre est le meilleur moyen de générer de l’intérêt autour de ton œuvre (en permettant aux lecteurs de se l’approprier pour en faire autre chose). Alors go !

* Voudrais-tu rajouter quelque chose, concernant ton art, ta vision de la culture, qui n’a pas été traité dans les questions précédentes ?

Mmh, que dire de plus ? Quand je parle de licence libre, de culture, etc., c’est un zoom sur une toute petite partie du problème : mais si tu regardes les choses globalement, c’est lié aux problématiques posées par le capitalisme en général, l’organisation sociétale du travail, de la rémunération, etc. La précarité organisée des auteurs, ça rejoint les problématiques de l’ouvrier dont on délocalise l’emploi (et donc le salaire, bah tiens).

La culture libre, ça essaie aussi de trouver des solutions des problèmes de démocratie posées par la culture non-libre, avec des conglomérats comme Disney, Warner et cie qui ont un contrôle absolu sur ce qui fait une grande partie de la culture populaire. En fait c’est un fabuleux moyen de contrôle social, mais encore une fois, ce qui s’applique à l’art s’applique au reste : plus une entreprise est grosse, plus elle a de pouvoir, et plus les citoyens devraient avoir leur mot à dire sur ce qu’elle fait… mais on en est loin.

On pourrait aussi causer de salaire à vie, de gestion collective des moyens de productions, voire même d’anarchie et tout le bazar, mais ça prendrait 3 heures alors je vais m’arrêter là.

Vous pouvez retrouvez Gee sur les réseaux suivants :

Page perso : https://ptilouk.net
Blog : https://grisebouille.net/
Wattpad : https://www.wattpad.com/user/ptilouk
Lulu : https://www.lulu.com/shop/search.ep?keyWords=simon+giraudot&type=

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